Mon précédent article portait sur l’importance de partager la vision d’avenir de son leader pour donner du sens à son travail. Un travail qui a du sens procure de la satisfaction, un certain bien-être au travail qui, plus encore qu’un bien-avoir, pousse à se dépasser.
Donc, votre patron est un leader charismatique. Vous avez envie de le suivre. Votre travail a du sens. Vous êtes dans une super boite avec un super boulot, tout comme Robert, qui y croit dur comme fer et dont nous allons étudier le cas.
Robert a déjà eu plusieurs métiers, certains faciles et épanouissants, en commercial et en communication, d’autres moins, dans le contrôle de gestion. Aujourd’hui, il a le vent en poupe. On lui confie une nouvelle mission. Il y consacre beaucoup d’énergie pour des résultats qui, selon lui, ne sont pas reconnus. Robert a de bonnes raisons et il a souvent raison. Il n’y a que son chef qu’il lui faut convaincre. Finalement, c’est un échec : la réorganisation attendue ignore ses recommandations. Le projet qu’il maîtrise lui est retiré. On élargit son champ d’action à d’autres domaines, sans assistance ni budget. Robert s’obstine à vouloir montrer qu’il peut bien faire. En quelques semaines, il tombe dans le mauvais esprit et les sarcasmes. Il aura la chance de se faire virer avant de finir en hôpital psychiatrique.
C’est une recette du burn-out : sortez quelqu’un de son champ d’expertise, donnez-lui des objectifs élevés et retirez-lui ses moyens. Si vous connaissez cette situation, peut-être vous faudrait-il changer d’entreprise.
Comment le très impliqué Robert à qui tout réussissait est-il devenu incompétent ? La tâche était rude, peut-être. Il avait apparemment un ego très fort. En fait, il en imposait beaucoup, avait la boutade facile et son humour n’était pas toujours apprécié. Robert aurait certainement eu des idées plus pertinentes s’il avait été plus attentif aux autres et eu moins souvent raison. Pourtant, en dehors du travail, Robert passe pour un type sympathique, voire empathique. Alors… s’agit-il seulement d’égo ?
L’ego est la représentation et la conscience que l’on a de soi-même. Fondement de notre identité, il peut, s’il est figé, devenir une entrave à notre évolution personnelle. Les problèmes apparaissent quand l’image de nous que nous renvoient les autres se heurte à celle que nous nous sommes construite intérieurement. Se faire virer a sans doute secoué bien fort l’ego de Robert et son besoin de reconnaissance. Souhaitons-lui d’en tirer les enseignements pour se reconstruire un ego plus souple.
Nous avons effectivement trois façons d’apprendre : jouer, imiter, nous tromper.
Les comportements de Robert semblaient aussi liés à son environnement. Dans sa carrière, les métiers faciles et épanouissants qu’il a connu ont le point commun d’être des métiers de contact. Ceux dans lesquels il s’est retrouvé en difficulté ont celui d’être très administratifs. De même qu’un commercial fait des efforts démesurés pour faire sa comptabilité et qu’un comptable fait rarement un bon vendeur, dans cette histoire, même s’il voulait croire qu’il était compétent en tout, Robert n’était pas à sa place.
Un modèle proposé par les neurosciences illustre ce propos. Nos hémisphères cérébraux se répartiraient les tâches ainsi : au cerveau gauche la reconnaissance des formes, surtout utilisée par les métiers procéduriers, administratifs ou techniques, et au cerveau droit la créativité, les contacts et les échanges, notamment exploité par les commerciaux, les communicants et les artistes. Et pour vous, quelle tâche est facile ? Dans quel rôle êtes-vous le meilleur ?
L’entreprise réagit comme un cerveau. Elle réunit des personnes et des métiers qui privilégient l’un ou l’autre de leurs hémisphères. Des gestionnaires et des communicants. Elle a besoin des deux et à tous les niveaux.
Il en est de même pour la conduite du changement : elle nécessite la collaboration de deux experts aux approches complémentaires : un conseil pour les aspects techniques et procéduraux de la transformation et un coach, pour l’accompagnement humain qui facilitera l’adhésion et l’implication des collaborateurs… en leur faisant prendre de la hauteur sur leur environnement, leurs comportements, leurs compétences, leurs croyances et leurs valeurs, leur égo, leur appartenance et leur vision.
Robert aurait eu besoin d’un bon coach.
© Anselme Briand – 24/04/2019